Salah Abdeslam à l’écran dans la salle d’audience lors du procès le 13 novembre, devant le tribunal spécial de Paris, le 13 avril 2022. SERGIO AQUINDO POUR “LE MONDE”
Salah Abdeslam connaît la valeur de sa parole et a appris à en profiter pour obtenir l’écoute dont il a besoin. Il y a deux semaines, il a exercé son droit au silence le jour le plus attendu depuis l’ouverture du procès le 13 novembre : son interrogatoire le soir des attentats. Mercredi 13 avril, alors que le tribunal spécial de Paris devait l’entendre pour la dernière fois sur les événements après les attentats, le seul rescapé des commandos dirigeait l’audience dans une dimension insoupçonnée avec une phrase : “Aujourd’hui je vais m’exprimer . »
Salah Abdeslam ne s’est pas contenté de s’en tenir au programme initial de cet interrogatoire, qui devait couvrir les heures et les jours après les attentats. Après six ans de silence et sept mois de débats, il a choisi son jour pour présenter ce qu’on avait trop attendu et qu’on n’espérait plus : le premier récit détaillé de « son » 13 novembre. Il a notamment révélé quelle était sa mission cette nuit-là : un attentat suicide dans un bar du 18e arrondissement de Paris, auquel il a renoncé à la dernière minute, dit-il, par « humanité ».
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Avant les premières questions du président, l’accusé a tenu à expliquer son changement d’avis : « Si j’ai exercé mon droit au silence, c’est parce que je ne me suis pas senti entendu. Je comprends que l’exercice, qui est le tribunal, n’est pas facile. Mais je pense que depuis le début de cette affaire, les gens ne peuvent pas accepter qui je suis vraiment. On a cette image de moi faite par les médias qui ne correspond pas à ce qu’on voit aujourd’hui, et c’est troublant. Je décide de m’exprimer, car c’est la dernière fois que j’en ai l’occasion… »
Désormais, les questions du tribunal n’ont plus d’importance. Salah Abdeslam a obtenu l’audience qu’il réclamait. Pendant près de deux heures et demie, il dira “sa” vérité. Le “combattant” autoproclamé de l’organisation Etat islamique (EI), qui a éructé dans le box au début du procès, a cédé la place à un accusé pondéré, mesurant chacune de ses paroles, en calculant l’effet. Désormais, seule son histoire compte. Salah Abdeslam a calmé le procès contre lui.
Genèse : “J’ai dû aller en Syrie”
Pour clarifier sa version des faits, l’accusé entend d’abord revenir sur la genèse de sa mission. Nous sommes à neuf mois des attentats : son frère aîné Brahim, le futur kamikaze de Comptor Voltaire, vient de rentrer d’un court séjour en Syrie, où il a vu son ami Abdelhamid Aboud, coordinateur des attentats.
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