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Guy Lafleur 1951-2022 | J’aime Lafleur, encore et encore

J’ai pensé à Guy Lafleur tout le week-end. A cet amour qui a éclaté vendredi, à tout cet amour qui a été retenu par la pudeur collective, parce que nous savions qu’il était malade, parce que nous savions sans l’avouer que ce cancer ne pouvait pas bien finir.

Posté à 18h00

Oui, oui, bien sûr, les exploits sportifs : la beauté, la vitesse des belles années, le sentiment aussi dramatique que ce fameux but, qui a égalisé le résultat contre le crucifié Gilles Gilbert, le but qui a ouvert la voie à la quatrième consécutive Coupe…

Mais depuis vendredi, je ne parle pas de l’athlète, mais de l’homme, mais des milliers d’anecdotes témoignant de la générosité de Guy Lafleur, dont je parle aussi des jambes.

Vous ne pouvez pas imaginer ce que c’était d’être Guy Lafleur dans les années 1970, dans les années 1980. Pensez à Jésus traversant un congrès de chrétiens. C’était Guy Lafleur, Dieu parmi les hommes, à une époque où les Canadiens étaient la religion unificatrice de la nation.

Il pouvait s’ennuyer d’anxiété, crier, demander des autographes et des photos, où qu’il aille, où qu’il soit. Cependant, non. Nous recherchons toujours un chrétien qui tolérerait l’impatience de Lafleur dans la vie civile.

Une anecdote entre mille. C’est Bertrand Raymond, un ancien chroniqueur du Journal de Montréal, qui me l’a dit à l’antenne l’autre jour. Un homme appelle Bert et demande s’il serait possible que Guy Lafleur vienne à Gatineau voir son frère mourant, dont le désir ultime était de rencontrer Flower…

Le greffier a envoyé la demande à la légende, qui a répondu: “Bon, oui, j’irai, il m’emmènera faire un tour en hélicoptère …”

Ce jour-là, une tempête de neige, l’hélicoptère numéro 10 ne pouvait évidemment pas voler.

Bertrand Raymond dit : “D’autres annuleraient…”

Pas Guy Lafleur.

Il se rend à Gatineau en char un jour de tempête de neige pour saluer un étranger qui veut rencontrer son dieu vivant. L’homme a dû être surpris de rencontrer un homme de chair et de sang, un homme généreux qui savait la chance qu’il avait d’être aimé, et qui le rendait autant qu’il le pouvait sans se plaindre, bien conscient de ce qui résonnait dans son cœur de followers.

Dimanche, au Centre Bell, Boston a affronté le Canadien. Les Mauvais Bruins. Ces Bruins que Lafleur enlève si souvent, ces Bruins qui avaient menacé quelque part dans les années 1970 de lui couper la tête…

Le numéro 10 les avait décapités seuls, trop fort, trop vite, trop habilement.

Bruins dans la ville, les premiers visiteurs après la mort du démon de la Russie. Vous ne pouvez pas penser à ça.

Avant le match, bien sûr, une cérémonie en l’honneur de Guy Lafleur. Et les fidèles ont fait ce qu’ils ont fait quand il a brûlé la glace, quand nous étions grands avec lui, quand nous avons gagné avec lui…

Les fidèles ont applaudi.

Dans dix minutes.

Dix minutes d’applaudissements, pensez-y : c’est très, très long.

L’annonceur de la maison Michel Lacroix a tenté de retrouver une certaine discipline pour continuer, mais rien n’y fit. Et peut-être que M. Lacroix savait que les croyants doivent aller jusqu’au bout de leur amour.

On a fait défiler les photos de Guy Lafleur sur la musique de Janet Reno. D’une légende à l’autre, en quelque sorte.

La chanson de Janet qui nous fait rugir : L’essentiel. Oui, oui, bien sûr, je sais, il y a ce passage du refrain : « L’essentiel, c’est d’être aimé.

Mais ce n’est pas le passage qui colle le plus à Lafleur, non, non, je parle d’une autre fin, pas de notoriété, je parle de cette fin, comme on pense. écrit à propos des circonstances : “C’est inspirer à l’autre un sentiment si fort que pouvoir survivre au-delà de la mort, c’est être aimé encore et encore…”

Les exploits sportifs de Guy Lafleur n’expliquent pas à eux seuls l’amour fort que les Québécois portent à celui qui vient de mourir. Nous avons eu 50 ans pour découvrir que derrière le patineur, derrière le buteur, se cache un homme très ordinaire qui est resté humble là où d’autres – avec un dixième de sa notoriété – sont devenus des caricatures indélébiles de papa, incapable de contrôler la notoriété. …

J’ai toujours su que Guy Lafleur existait. Je suis né dans la religion des Canadiens, et quand j’ai réalisé le monde, vers 4-5 ans, j’ai réalisé que les Canadiens de Montréal sont énormes dans la vie des gens, j’ai toujours su que Guy Lafleur était comme Dieu : partout.

Et c’est là que Guy Lafleur est mort. Je peux à peine écrire ces mots. Parce que depuis que j’ai réalisé le monde, Guy Lafleur existe. Guy Lafleur est mort et pourtant il est immortel, aimé encore et encore. Pour ce qu’il était en tant qu’homme, tellement – peut-être plus – que pour ce qui était le numéro 10 des 70 glorieux.